Attentats de Bruxelles – Association malsaine et galvaudage d’intérêts

Mardi 22 mars, la Belgique par sa ville européenne Bruxelles a été frappée par des attentats sans précédent dans le pays. L’Europe entière, le monde entier, est ébranlé et se retrouve de nouveau acculé dans un désarroi idéologique et politique face à l’acharnement islamiste terroriste qui s’exprime non plus seulement en périphérie des frontières européennes, mais au cœur même du vieux continent, dans l’un de ses poumons culturels et économiques pour Paris, au centre de la décision politique européenne pour Bruxelles. Ces derniers attentats réentaillent brusquement la blessure subie par la France lors des attentats parisiens du 13 novembre 2015, blessure opiniâtre que l’état français peine depuis quatre mois à cautériser malgré ses moyens militaires déployés et ses velléités de réforme juridique et sociale.

Alors j’entends depuis le continent africain des voix plus ou moins sourdes de personnes longtemps frustrées par les politiques d’anciennes puissances coloniales qui s’élèvent pour justifier les attaques par la loi du talion “oeil pour oeil, dent pour dent”. Certaines vont même jusqu’à prétendre que ces islamistes terroristes agissent pour la cause des Africains qui continuent de souffrir depuis 500 ans des crimes de l’esclavage, de la traite négrière, de la colonisation et des politiques néo-coloniales exercées par les pays occidentaux. Ce genre de justification doit être récusé aussi promptement et vigoureusement que possible, ce dans la mesure où il prête à un dédouanement en substance de ces criminels barbares et à une assimilation perverse à leurs revendications haineuses et régressives. De plus, il trahit l’illusion navrante qu’une quelconque justice commune aux wahhabites et aux africains puisse être rendue au travers d’attentats fanatiques et lâches; probablement un délire qui en dit long sur l’incapacité des africains à s’extirper de l’indignité séculaire subie pour se responsabiliser devant les maux multiples qui les accablent. Enfin, sur un plan plus factuel, ce genre de justification traduit l’ignorance des revendications wahhabites qui sont similaires à celles motivant les crimes commis par des groupes tels que Boko Haram et Al Shabaab agissant principalement sur le continent africain et dont les victimes sont dans leur grande majorité des Africains.

Tout désastreux et vertigineux que soient les ravages coloniaux et post-coloniaux, on ne saurait pour autant confondre les intérêts et le salut du continent africain avec ceux d’islamistes wahhabites. Si dans les conditions actuelles, en guise de défense de leurs intérêts économiques et politiques, les Africains sont tentés de s’engager dans une confrontation avec les pays occidentaux, alors ils doivent le faire eux-mêmes, selon leurs propres termes et sur la base de leurs propres revendications, au lieu de lorgner sur les actes ignobles de terroristes barbares.

L’Histoire est jalonnée de péripéties et retournements civilisationnels qui devraient nous apprendre à ne plus être dupes au regard de ce qui nous définit en tant qu’africains mais aussi en tant qu’êtres humains. L’Histoire, par son caractère “généreux” en événements de collisions culturelles, doit nous amener à ajuster toujours davantage la lentille servant à reconnaître les valeurs qui nous unissent. Par son observation et les leçons que nous en tirons, l’Histoire doit nous permettre de ne plus faire de compromis ni d’amalgame quant au futur que nous voulons construire pour le continent. Enfin, une conscience humaniste alerte et une vigilance morale doivent nous prémunir contre toute gratification ressentie du fait d’actes de sauvagerie, où qu’ils soient perpétrés, portant atteinte à la dignité humaine et à la préservation de l’universel de vie.